LES FLAMANDS SONT-ILS D’AFFREUX NATIONALISTES ?

Grâces aux dernières (?) concessions communautaires (notamment la scission de BHV) les francophones s’attendaient à ce que les Flamands donnent une chance à ce gouvernement accouché dans la douleur. Et voilà que différents sondages créditent la Nieuw Vlaams Alliantie ( NVA) de près de 40% des intentions de vote en Flandre. Si l’on ajoute les 12% du Vlaams Belang (VB) cela signifie qu’environ la moitié des Flamands veulent voter pour des partis ouvertement hostiles aux efforts unitaristes du gouvernement belge. 

 

Est-ce vraiment une surprise ? A qui la faute ? Au méchant Bart De Wever ?

 

Cela fait un demi siècle que j’entends les Francophones dire que ce sont tous ces politiciens "extrémistes" qui sèment la zizanie entre Belges qui ne demandent qu’à vivre ensemble. A force de répéter ce mantra on avait fini par oublier que nous vivons en démocratie. Et que c’est le peuple qui choisit ses élites. 

 

Je me souviens d’une conversation privée avec une collègue flamande de l’Universiteit Antwerpen qui s’intéresse comme moi à la psychologie politique. Je lui disais (en anglais et en boutade – je suis trilingue !) : « Pour toi c’est facile de donner des conseils psychologiques aux hommes politiques flamands. Il te suffit de leur suggérer de dire du mal des francophones pour faire augmenter leur score électoral ! ». Elle sourit à ma petite provocation et ne protesta pas le moins du monde. Car elle avait compris depuis longtemps que ce n’est pas Bart de Wever qui a créé le phénomène du nationalisme flamand. C’est le peuple flamand qui a créé le phénomène Bart De Wever. Les francophones bienpensants me rétorqueront : « Non, ce n’est pas le peuple flamand, ce n’est qu’une minorité ». Or, les sondages montrent que l’insubmersible Titanic du "prêt-à-penser-naïf" francophone prend de plus en plus l’eau.  

 

Faut-il en conclure que les Flamands (enfin 50% d’entre eux) sont devenus des affreux nationalistes, voire des fascistes en devenir ! Certainement pas. Cependant, comme les Catalans ou les Québécois, ils possèdent une identité culturelle forte. C’est leur droit et leur fierté. Les Flamands, à l’image d’autres peuples de la terre, expriment simplement leur souhait de vivre entre Flamands à la façon flamande. Dans une forme d’homogénéité linguistique et culturelle à contre courant du multiculturalisme ambiant. Par ailleurs, des études scientifiques montrent que les Flamands – y compris ceux qui votent NVA – aiment les vacances en Wallonie et ne souhaitent pas la scission du pays. Est-ce contradictoire ?

 

Ceux qui fréquentent les conciliabules des dirigeants flamands savent très bien que la menace de la scission sert essentiellement d’arme de terreur psychologique destinée aux Francophones. Et cela marche extraordinairement bien ! Car la peur de perdre la Belgique est l’émotion dominante chez les francophones et leurs élus. Ils sont terrorisés à l’idée de sombrer dans la misère noire sans l’argent des Flamands. Ils sont angoissés, en cas d’autonomie de Bruxelles et de la Wallonie, de devoir se comporter de façon autonome, digne et émancipée. 

 

Or, je suis intimement convaincu que les Flamands ne veulent pas réduire leur territoire à la seule Flandre. Ils souhaitent simplement que les Bruxellois acceptent de vivre « à la flamande » dans la capitale de la Flandre. Et que les Wallons minoritaires acceptent aussi de vivre « à la flamande » dans une Belgique démographiquement, politiquement et économiquement dominée par la Flandre. D’ailleurs, les Flamands ont déjà conquis pratiquement tous les postes clés, prestigieux et rémunérateurs de la Belgique Fédérale. Tout serait plus simple et les problèmes communautaires disparaitraient si les Francophones acceptaient une fois pour toute la réalité d’une Belgique flamande (Vlaams Belgïe) où il faut apprendre à vivre « à la flamande ». 

 

 

Une métaphore peut illustrer mon analyse politico-psychologique : Si un membre d’un couple n’est plus heureux de la vie commune. S’il ne veut plus partager les dépenses, s’il ne supporte plus la langue de l’autre dans sa chambre, s’il trace une frontière dans la maison et s’il menace de divorcer. Quelles options restent à l’autre ? Soit prendre la menace de divorce au mot. Et entamer la procédure pour prendre son autonomie en main. C’est ce qu’on fait les Slovaques. Soit sauver le couple à n’importe quel prix. Il faut alors accepter de se soumettre aux désidératas de l’autre. C’est le choix des Bruxellois et des Wallons qui votent massivement pour les partis "unitaristes". Il serait vraiment injuste de ne pas l’assumer et de le reprocher aux Flamands. Mais rien ne vous oblige à penser comme moi …