L’athlète Oscar Pistorius fut nommé en 2012 par le magazine américain Time une des 100 personnes les plus influentes de la planète. Et qualifié de « La définition même d’une inspiration pour tous ». Il était présenté aux jeunes du monde entier comme un exemple de courage et d’abnégation. Amputé des deux jambes, il fut le premier homme à pouvoir participer aux jeux Olympiques avec les athlètes « valides ». Ce héros des temps moderne est maintenant accusé d’avoir assassiné sa petite amie Reeva Steenkamp élue elle-même « une des 100 femmes les plus sexy du monde » par le magazine FHM. D’abord, ce triste fait divers nous rappelle qu’un meurtre sur cinq a lieu au sein du couple et que ce sont pratiquement toujours les femmes qui en sont victimes. Ensuite, il nous interpelle sur notre propension à glorifier, puis calomnier, des humains transformés en surhommes. En effet, à peine l’accusation était connue qu’apparaissaient des rumeurs sordides sur Oscar Pistorius le décrivant comme un personnage susceptible, mauvais perdant, violent et peut-être même consommateur de dopants. L’«inspiration pour tous » s’est soudainement transformé en « mauvais exemple pour tous », tout comme Lance Armstrong.
Cela pose question sur le phénomène psychologique du culte de la personnalité. Il est vrai que nous avons besoin d’admirer et de porter aux nues des gens qui sont bien meilleurs que nous. Quand j’étais jeune je n’entendais que du bien à propos d’un homme exceptionnel nommé Mao Tsé Toung. C’était un héros qui avait sorti la Chine de la misère et lui avait permis de faire un grand bond en avant. Bien des années plus tard, je compris que c’était un monstre cruel et sanguinaire dont le « bond en avant » provoqua d’épouvantables famines qui tuèrent plus de 20 millions de chinois. Certes, tous les grands hommes ne sont pas des criminels et beaucoup d’entre eux mènent une vie respectable sans tuer personne. Mais sont-ils pour autant si exemplaires ?
Si on y réfléchit, il est difficile de trouver un seul homme ou femme dont les comportements ne furent pas quelques fois sujets à caution. Je prends pour exemple celui que beaucoup considèrent comme l’exemple absolu: Mohandas Karamchand Gandhi, dit le « Mahatma » (Grande âme). Il se fait qu’il éprouvait aussi le besoin de considérer certains hommes comme des héros. Il fut, notamment, un fervent admirateur de Benito Mussolini . Par ailleurs, sa préoccupation constante de l’abstinence sexuelle (dans un pays traditionnellement peu puritain) le poussa à interdire aux couples mariés fréquentant son ashram de dormir ensemble et d’avoir des relations sexuelles. Tandis que lui-même s’entourait de jolies jeunes filles qui se dénudaient auprès de lui et partageaient sa couche. Faisant preuve d’un comportement pour le moins ambivalent qu’il justifiait par l’étrange souhait d’éprouver la solidité de ses vœux de chasteté…Mon propos n’est pas de dénigrer le respectable Gandhi, mais de montrer que même celui que de nombreuses personnes considèrent comme un saint était juste un homme…Comme psychologue, j’ai observé que les humains ont toujours les qualités de leurs défauts et les défauts de leurs qualités. Par ailleurs, je crois que tout homme et toute femme – aussi extraordinaire soit-il (elle) - a sa part d’ombre. Son Mister Hyde... Aussi je trouve que l’on ne devrait jamais baptiser une école, une fondation caritative, une rue, une place ou une quelconque institution publique du nom d’un être humain. Car on risque toujours de découvrir un jour que cette personne a un côté obscur qui n’est vraiment pas un bon exemple à suivre … Mais rien ne vous oblige à penser comme moi ...